La place des femmes
Pendant plusieurs siècles, une conception sexiste – autant que simpliste – réduit les femmes – et cela depuis l’origine de l’humanité – au rôle prépondérant de la femme au foyer : véritable métaphore qui nous renvoie à des mœurs quasiment tribales. Elles sont sous le joug d’un chef « paterfamilias », seigneur ou mari. Les juristes, les penseurs approuvent cela, dans l’antiquité « leur faiblesse d’esprit légitime leur incapacité juridique» ; et les docteurs de l’église comme Saint Thomas d’Aquin la juge « incapable de tenir une position juridique » Jules Ferry lui-même, pourtant partisan de « l’école de filles » cantonnait les femmes à leur mission domestique, et même patriotique en fonction des tourmentes de l’histoire.
Nous l’avons vu dans notre précédent dossier (« bien d’autres femmes »), le despotisme masculin n’a pas empêché l’émancipation de quelques grandes femmes d’exception, et l’existence timide d’une éducation féminine qui n’a cessé de se développer de la Renaissance au siècle des lumières. Ces femmes sont la proie de moqueries de la part d’hommes illustres dont on eût attendu davantage d’ouverture d’esprit François Villon, préférant les « dames du temps jadis » qui ne lui portaient pas ombrage, parlait de jeune « bachelette » comme d’une épouse modèle, Molière se moquait des « femmes savantes » ou des « précieuses ridicules », Voltaire (1594-1778) fit d’Eve la première bachelière en tant que « femme couverte de lauriers » car « elle tâta l’arbre de la science avant son mari » !
Ces femmes « exceptionnellement savantes » ne reculaient pourtant devant aucune innovation. Nous avons déjà rendu hommage à la clermontoise, Angélique Marguerite Le Boursier Du Coudray (1712-1794), la première sage-femme à enseigner l’art de l’accouchement. Quant à Olympe de Gouge, bourgeoise aisée de Montauban, montée à Paris, de mœurs libres, elle était favorable à l’affranchissement des esclaves noirs et à la recherche de paternité pour les enfants nés hors mariage. Femme de lettres elle eut l’audace de publier une déclaration des droits de la femme et de la citoyenne ».
Héloïse (1082-1164), l’abbesse du Paraclet, fait figure de féministe. Si l’on connait de façon plus ou moins légendaire les amours de cette jeune fille avec Abélard, on a une interprétation très actuelle du personnage dont on ne se contente pas de faire une femme fatale d’une rare beauté mais aussi une intellectuelle de haut niveau, un chantre de l’amour libre et une femme d’affaires en tant qu’abbesse.
Malgré ces exceptions, les hommes restent aux commandes et au moment où on instaure le bac et l’université, il n’est question des filles ni pour le diplômes, ni pour les études universitaires. Par ces créations l’Empereur veut former les élites indispensables au fonctionnement du pays, donc des hommes.