Auvergne laïque n° 487 - mars 2021 / DOSSIER

Conclusion : les deux combats des femmes

« La condition des femmes est de l’ordre de l’urgence…
Le féminisme, c’est la guerre.
Un combat contre la souffrance contre la laideur humaine. »

Leila Slimani (écrivaine)

A parcourir l’histoire de ces femmes prestigieuses, on mesure que deux aspirations permanentes animent tous leurs combats : l’aspiration à l’égalité avec les hommes qui se traduira par la législation de la parité ; et l’aspiration à la liberté, en particulier la liberté de disposer de leur corps et d’être maîtresses de leur vie.
A cela s’ajoute, en temps de guerres, un militantisme farouche en faveur du pacifisme, contre la barbarie, et contre la situation des combattants. Elles sont nombreuses à s’engager sur les champs de bataille pour soigner les blessés.

  • Pour l’égalité : pendant des siècles, les femmes sont écartées de tout, de l’éducation, du pouvoir, de la vie civile, des postes de responsabilités. Il faut attendre 1944 en France pour qu’elles obtiennent le droit de votre, au terme d’une longue lutte qui rassemble les femmes du monde entier. Or même Jules Ferry, à l’initiative un programme d’instruction très novateur, confine les femmes dans leurs fonctions domestiques, sous le prétexte qu’elles y excellent.
    Tout au long de l’histoire, cependant, bien des femmes ont refusé cet ilotisme, et se sont distinguées dans tous les domaines de la pensée, des sciences, des arts et de l’action. Quelques fortes femmes – Blanche de Castille, Catherine de Médicis, entre autres – ont supplanté les hommes dans l’exercice du pouvoir.
    Le 16 août 1861, Marie Daubier, une institutrice de 36 ans, est la première femme bachelière de France. On est sidéré d’apprendre aujourd’hui que le ministre de l’instruction publique, Victor Duruy, refusa de signer son diplôme de crainte d’être ridiculisé. Il faut l’intervention de l’impératrice Eugénie pour qu’il y consente. (1)

La conquête de la parité est-elle acquise ? De grands progrès ont été réalisés, en particulier dans les institutions ; pourtant, dans tous les lieux où la mixité est instaurée, les femmes souffrent encore du sexisme plus ou moins débonnaire de leurs collègues masculins ; ce qui prouve que les êtres sont plus difficiles à juguler que les idées.

  • Pour la liberté : Dans ce domaine, les femmes ont eu à se libérer de 20 siècles de morale religieuse. Cependant, au milieu du siècle dernier, la grande humaniste américaine Helen Keller milite déjà pour l’avortement libre. Des femmes de passion affichent à la fois une activité intellectuelle remarquable et une émancipation de mœurs jugée audacieuse par leurs contemporains, et totalement d’avant-garde de nos jours. Parmi les plus célèbres, Héloïse, Christine de Suède, Marguerite de Navarre, la grande Catherine de Russie séduite par la philosophie des lumières…

Malgré d’incontestables avancées, les combats ne sont pas gagnés pour autant, comme le prouve la permanence d’un militantisme féminin très engagé, en faveur des femmes du monde entier. Trop de femmes encore sont victimes des régimes politiques dictatoriaux, de situations économiques désastreuses, des intégrismes religieux, de toutes les formes d’oppression dont l’oppression sexuelle qui frappe toutes les générations de femmes. Des femmes de courage, comme Leila Slimani, n’hésitent pas à témoigner et à continuer la lutte.

(1) Cité par Françoise Pottier-Bechet (historienne) dans un article remarquable sur « les femmes et le baccalauréat »