Auvergne laïque n° 487 - mars 2021 / DOSSIER

La machine de Madame Du Couvray

Dans son film « le médecin des lumières », René Allio a montré les conditions désastreuses – d’hygiène en particulier – dans lesquelles, jusqu’au 18è siècle, se déroulaient les accouchements.
Nos préjugés sont si fortement ancrés qu’on a du mal à concevoir qu’une seule femme ait réussi à assainir cette situation et ait contribué ainsi aux progrès de la natalité, ce que l’académie de médecine ne lui reconnaît pas. On lui doit en particulier la naissance miraculeuse de La Fayette. Cette femme, c’est Angélique du Coudray, sage-femme française née en 1712 à Clermont-Ferrand. Elle est la première à enseigner en public l’art des accouchements afin de former des praticiennes éduquées capables de remplacer les matrones auprès des accouchées. Son action est colossale et couvre tout le royaume ; elle forme près de 5000 sages-femmes, des chirurgiens, et fait ouvrir des maternités dans toutes les grandes villes de France.
La singularité de la sage-femme, c’est l’invention d’une « machine », qu’elle appelle « la machine de madame du Couvray » ; il s’agit d’un mannequin en carton-pâte qui reproduit dans les moindres détails – y compris l’irrigation des vaisseaux – le bassin de la femme et qui va lui permettre d’illustrer efficacement ses formations.


Elle devra elle aussi combattre l’opposition de ceux qui veulent « réserver l’accouchement aux hommes », et qui se moquent de sa machine. Mais les femmes, qui veulent – déjà – la liberté totale, sont favorables à Madame du Couvray. Privée des aides d’un état trop pauvre, elle mourra dans la solitude et le dénuement. 
Elle publie en 1759 l’Abrégé de l’Art des accouchements, qui, réédité en 1769, fait toujours école. Une rue à Clermont-Ferrand porte son nom.